samedi 22 octobre 2011

Tony


Un des phénomènes de l'édition musicale de ces derniers mois est le disque de Tony Bennett Duets 2. N° 1 au Billboard 200, il enregistre des chiffres de ventes inespérés, s'agissant d'un vieux crooner italo-américain qui a connu le succès dans les années 50, bien que sa renommée ne fut jamais celle d'un Frank Sinatra.

Si la mort subite d'une des duettistes, Amy Winehouse, a sans doute favorisé la promotion, malheureusement, ce succès de Tony n'est pas le premier et ne peut s'expliquer par ce seul événement extra musical.


Le disque n'est certainement pas son meilleur et n'atteint pas l'excellence des albums des années 60, comme celui avec Count Basie, au hasard. Pour autant la musique est bonne et chacun des artistes présents fait de son mieux pour être au niveau du maître. Il y a des réussites, les plus incontestables sont les duos avec Lady Gaga sur The lady is a tramp et Amy Winehouse, déjà citée, sur Body and soul. Aretha Franklin, Michael Bublé ou Natalie Cole sont égaux à eux même sans plus, ce qui est déjà bien. Norah Jones également c'est à dire que sa voix est aussi excitante qu'un frigidaire vide. Il y a même un vrai ratage avec Andrea Bocelli sur Stanger in Paradise.

Mais le succès d'une telle entreprise ne repose pas sur le compromis ni les compromissions. Tony Bennett y chante de sa façon ( magnifique ) habituelle sans aucune concession. C'est un chanteur « de Jazz » tendance crooner swinguant de la meilleure eau . Le répertoire n'est pas non plus sollicité pour « faire jeune ». Pratiquement que des standards et le duo avec Amy Winehouse, vu des millions de fois sur Youtube, repose sur « body and soul », cheval de bataille de Coleman Hawkins, écrit en 1930, presqu'aussi vieux que Tony ( 85 ans) lui même et archétype s'il en est du standard « de Jazz ».


Le bloggeur américain Clyde Smith a interrogé longuement l'artisan des succès de Tony, son imprésario/producteur Danny Bennett qui, vous l'aurez compris, n'est autre que le propre fils de l'artiste. Vous trouverez ici les liens vers le papier de Clyde Smith.http://www.allaboutjazz.com/php/news.php?id=88530

En résumé, l'auteur nous apprend qu'au début des années 80, comme tous les artistes de sa génération TB était dans une mauvaise passe ; vente de disques en berne, public vieillissant et disparaissant peu à peu. Comme ses congénères il était réduit à d'incessantes galères de tournées, le must était un engagement un peu long à Las Vegas, ringardisant encore l'image du crooner. Ajoutons, même si Clyde ne l'évoque pas, que le train de vie somptueux de Tony l'avait ruiné et qu'il était au bord de la banqueroute. Quand son fils a repris en mains sa carrière il est parti de trois postulats :

  • Continuer sans changer l'approche de la musique qui ont fait de Tony un classique du Jazz vocal.
  • Aller à la rencontre d'un public jeune sans prendre pour argent comptant les assertions des compagnies de disques quant à la ringardisation inévitable des artistes âgés ( Il n'y a pas d'âge pour écouter Beethoven ! )
  • Ne pas simplement faire avec les changements technologiques du métier mais essayer de les précéder.

Si la réalisation du point 1 était la plus facile, le fils Bennett a poursuivi la réalisation du point deux systématiquement. Tournées des collèges plutôt que Las Vegas, même programmation que les Red Hot Chili peppers et surtout intense lobbying auprès de MTV qui conduira à l'apparition de Tony Bennett au MTV Unplugged en 1994, après avoir avoir été un des premiers à nourrir la chaîne de Clips.

Sur le plan de la technologie, Tony sera un des premiers dans les années 80 à abandonner le format LP ou cassette et faire la transition vers le CD avec une production adaptée ( enregistrement numérique sans transfert etc ..) puis plus tard vers le Web.

Aujourd'hui le site Internet de Tony, que vous trouverez là …http://tonybennett.com/ est un des plus remarquables et interactifs de la profession. Les ventes digitales ( Itunes notamment ) sont poussées au maximum.

Il est juste de souligner que le renouveau du genre avec des artistes comme Harry Connick Jr ou Michael Bublé, qui à mon humble avis n'arrivent pas à la cheville de la sainte trinité ;Frankie ( Sinatra ) Tony ( Bennett) Mel ( Tormé ), a aidé la carrière du survivant.

A la question «  conseil à un jeune artiste pour réussir » Danny Bennett répond : «  Y croire à 100 % et ne pas avoir le choix « .

Toute cette belle histoire m'amène à la révolution de Jazzmin. Vous avez sans doute vu que les meneurs ( qu'on appelle maintenant les « indignés du Jazz », bientôt, de glissement sémantique en glissement sémantique, ils deviendront les damnés de la terre!!) ont été reçus par le ministre de la culture qui, paraît il va se pencher sur leur cas.

Il est, ne trouvez vous pas, intéressant de comparer la démarche du jeune vieux monsieur Bennett, allant chercher le public où il est sans rien renier de son art, et celle des vieux jeunes messieurs parisiens allant cogner avec la sébile à la porte des ministères. Bon, ce que j'en dis c'est rien que pour être méchant, j'adore ça.

En récompense de m'avoir lu jusqu'ici deux cadeaux ; le clip de Tony avec Lady Gaga et celui avec Ami.

Tony Bennett ladies and gentlemen.


A bientôt chers petits amis...  

1 commentaire:

  1. Lady Gaga est vraiment bluffante sur ce répertoire ! Amy Winehouse, on la connaissait déjà comme chanteuse de jazz, mais la Gaga... M'enfin, ceux qui l'avaient entendu seule au piano savaient déjà qu'elle n'est pas seulement une machine à fric.

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