Croix de bois, croix de fer, si je cross over je vais en enfer.
Bonjour les amis. Je m'aperçois que j'ai failli à tous mes devoirs en intitulant mon blog : "a caddy for daddy" , en faisant ainsi référence de façon délibérée au disque de Hank Mobley de 1965 et en ne permettant pas, à ceux qui ne le connaîtraient pas encore, d'avoir une petite idée de la musique en question. Erreur reconnue aussitôt réparée ; voilà dans une version youtubesque le fameux caddy pour le fameux daddy: enjoy !!
vous avez bien sûr remarqué, futés comme vous l'êtes, que tout ça n'a jusqu'ici aucun rapport avec le titre de ce message. J'y viens, j'y viens, ne soyez pas impatients.
Le cross over est une manifestation peu répandue sous nos latitudes mais très commune aux États-Unis. De quoi s'agit-il ? Tentons de le caractériser simplement et rapidement. Il s'agit pour un artiste, cantonné dans un genre spécifique d'essayer d'étendre le plus possible son audience, de façon à gagner le plus de sous possible, ce que le genre dans lequel il est précédemment cantonné ne lui permet généralement pas.
Le cross over suppose donc cette démarche, mais cela est subtil car l'artiste en question ne doit pas s'éloigner totalement de sa manière d'origine.
Je vois que vous ne suivez pas totalement. je prends donc un exemple simple. Examinons le cas de Sacha Distel. Honnête guitariste de jazz, moderne pour l'époque, façon Jimmy Raney modifié Tal Farlow. Notre beau Sacha se transforme à la fin des 50 en chanteur populaire spécialisé dans les rengaines cuculapralinesques.S'agit-il là de Crossover, Docteur, me demandez vous avec angoisse ? Point du tout chers petits lecteurs. Il s'agit là au contraire d'un cas de crétinisation caractérisé.
Examinons au contraire une pathologie typique de crossover. Il s'agit du cas de Sam Cooke. Inexplicablement peu connu en France, Sam Cooke a été une énorme vedette aux États-Unis et son style a ouvert la voie à de nombreux suiveurs, On peut dire que pratiquement c'est lui qui a inventé ce qui allait devenir la soul music.
A l'origine l'ami Sam n'était qu'un chanteur membre d'un de ces innombrables groupes de gospel qui sillonnaient le pays après la seconde guerre mondiale. Ce groupe, un des meilleurs de l'époque, s'appelait les « soul stirrer ». Malgré toute sa dévotion au seigneur, notre jeune chanteur cherchait aussi, ce que tout le monde cherche: la gloire, l'argent, les femmes et être reconnu par le maître d'hôtel au restaurant. Ça a donné ça :
Dans le cas de Sam Cooke le Cross over était double : en modifiant la musique, tout en restant fidèle aux fondamentaux de la musique religieuse africaine américaine. Mais également en transgressant le contenu même des paroles. En passant de la musique de Dieu à la musique du diable.
Dans son action de Crossover Sam Cooke a été servi par les événements, enfin si on peut dire. En effet il a été abattu à bout portant par la réceptionniste de l'hôtel où il se livrait à du tapage nocturne. C'était en 1964, il avait 33 ans. À l'époque, de nombreuses théories complotistes ont vu le jour dans la communauté africaine américaine, mêlant FBI, KKK and partners. En fait, comme souvent, la réalité était plus simple : il était bourré, et la maman du comptoir avait la gâchette facile. C'est la preuve que lorsque quelqu'un de très estimé est mêlé à une histoire sordide, le public a tendance à expliquer l'inexplicable par le complot (mais non, je ne fais allusion à aucune affaire qui aurait défrayé la chronique pendant la semaine écoulée ; vous voyez le mal partout j'ai déjà dit que je ne voulais pas en parler).
À ce propos, on ne peut s'empêcher de remarquer à quel point les artistes qui meurent jeune voient leur postérité optimisée. Le jazz ne fait pas exception à la règle, Charlie Parker, clifford Brown, Booker Little et plein d'autres ont bénéficié à plein de cet avantage. James Dean ou Modigliani s'en sont bien sortis également.
Bien évidemment Sam Cooke n'a pas inventé le cross over qui avait été utilisé avant lui, Un des exemples les plus lumineux est celui de Nat King Cole . Excellent pianiste à l'origine, disciple de Earl Hines qu'il influencera en retour, le bon Nat est passé du clavier sans voix au clavier avec voix, pour finir par la voix sans clavier.
Voilà Nat dans la cross ovérisation achevée, christmas song ,ladies and gentlemen :
De très nombreux artistes se sont livrés, pour les raisons mises plus haut en exergue, à cet exercice. Ray Charles, Aretha Franklin en sont des exemples parfaits. Et Charlie Parker with Strings pour qui croyez-vous qu'il s'adonnait à cette gaminerie ? De distingués musicologues ?
Cela étant cet exercice, à l'instar de tout ce qui se pratique sans filet, n'est pas sans risque, notamment de cassage de gueule.
Un bon exemple de ce qui est pour moi le fiasco total est le disque enregistré par Muddy Waters sous le titre « Electric Mud ». Cherchant à faire sortir son poulain du cadre pour lui trop étroit du blues, un des frères Chess avait imaginé entourer notre héros de musiciens funko psychédéliques comme Peter Cosey qui sévira plus tard chez Miles Davis. Voilà ce que ça donne ; si vous aimez ça faites vous examiner.
Parfois le Cross over touche un groupe complet d'artistes. Tamla Motown en est l'exemple ultime. Du coup je me demande, compte tenu de l'influence de la musique américaine sur celle du reste du globe au cours du siècle dernier, si le monde n'est pas un gigantesque cross over.
Qu'en pensez-vous chers petits lecteurs ? Je sollicite votre opinion et pour vous éviter de faire des phrases je vous propose de répondre simplement à ce questionnaire :
selon vous, le cross over :
- nuit gravement à la santé.
- Réduit les risques de maladies cardiaques et pulmonaires
- risque de conduire de la suite 2806 du Sofitel à une cellule de Rikers Island (allons bon voilà que ça recommence)
cochez la réponse qui vous semble appropriée et OpinionWay traitera en fonction de votre age, CSP etc.
Allez bon dimanche...
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