J’ai pas lu, j’ai pas vu…
Les plus anciens se souviennent sans doute de la rubrique de Cavanna dans le regretté Hara Kiri, intitulée « J’ai pas lu j’ai pas vu mais j’ai entendu causer ». Je suis un peu dans cette situation pour évoquer un livre récemment traduit ici: Qu’est-ce qu’on joue maintenant, livre que je n’ai pas encore lu mais pour lequel j’ai été alléché par la chronique de Michel Contat dans une récente édition du Monde. Le lien est ici:http://www.lemonde.fr/livres/article/2011/08/27/jazzmen-sociologues_1564314_3260.html
Si j’ai bien compris, nos auteurs (Becker et Faulkner), musiciens-sociologues, s’interrogent sur le répertoire et sa signification, à l’époque où ce répertoire, standards ou great american songbook, avait une signification et permettaient de faire jouer ensemble des Jazzmen de générations ou de style différents. Les tournées du JATP qui mettaient côte à côte Charlie Parker, Roy Eldidge ou Lester Young en étaient l’illustration ultime. Tout cela a largement disparu avec la pratique des jam sessions et des lieux dédiés à cet exercice. Chacun veut jouer des compositions originales, ce qui est très dommage mais c’est comme ça il faut s’y faire.
Une autre disparition évoquée par Michel Contat est celle des « Musiciens ordinaires » cohorte de ceux qui vivaient plus ou moins bien de leur art et d’où émergeaient les plus talentueux ou les génies comme Armstrong ou Parker. La musique enregistrée a remplacée la musique vivante pour la danse et les concerts se sont substitués aux salles de danse. Comme le pointe sagacement Contat il n’y a plus que des « artistes ». C’est pour cela que mes Unsung heros qui peuplent mes messages s’arrêtent généralement avec la fin des années 60 qui marque la fin des « musiciens ordinaires » et l’avènement des « artistes ».
Dans l’histoire compliquée du Jazz cette distinction entre « musiciens ordinaires », talentueux et génies est évidemment subjective selon la perspective du moment et la révision constante de l’histoire qui s’en suit; Que l’on songe à celle en cours aux États-Unis sur l’apport de Billy Strayhorn par exemple ( je suis en cours de lire sa bonne bio par David Hajdu que je recommande ) ou du pianiste Nat King Cole, longtemps éclipsé par l’excellent chanteur pop qu’il a été ensuite.
Tout ça pour introduire un de ces unsung heros dont la place devrait être réévaluée. Oscar Moore, puisque c’est lui, a brillé justement dans les années 40 dans le trio de Nat King Cole quand ce dernier inventait un genre nouveau dont il était à la fois le pianiste et le chanteur. Les faces gravées par ce trio, dont certaines « live » pour la radio, révèlent un guitariste étonnant de fraîcheur à la fois émule de Charlie Christian et ancré dans le blues. Malheureusement ce sera son heure de gloire sans véritable suite. Après une tentative R&B avec son frère Johnny et le pianiste chanteur Charles Brown ( The three blazers), Oscar gravera quelques disques sur la côte Ouest puis retombera dans l’obscurité jusqu’à sa disparition en 1981; Il abandonnera même tout à fait la musique pour devenir maçon!
Ses successeurs immédiats, Jimmy Raney, Tal Farlow, Johnny Smith etc adopteront un style très différent reprenant de Charlie Christian l’aspect « single notes » très épuré mais perdant parfois chaleur, swing et sens du blues que Moore possédait au plus haut degré. Il faudra attendre l’apparition de guitaristes comme Grant Green puis Wes Montgomery pour retrouver ces qualités dans leur jeu. En ce sens Oscar a été un précurseur injustement oublié aujourd’hui.
Une petit face d’Oscar en 1954 avec le pianiste Carl Perkins et Lee Young, le frère de Lester, à la batterie.
Oscar Moore ladies and Gentlemen.
En parlant de guitaristes on ne peut éviter la marque de guitare la plus usitée et la plus célèbre: Gibson. Je lis dans la presse américaine que l’entreprise ( très prospère) Gibson vient d’être l’objet d’un raid musclé des agents fédéraux. La firme est suspectée d’utiliser pour sa coupable industrie des espèces de bois protégées. Des palettes entières de bois et des guitares ont été ainsi saisies par les Feds. Bien que le patron de Gibson se défende comme un beau diable dans un bénitier le doute est instillé.
Plus grave, un éminent professeur de droit et guitariste à ses heures rappelle que les possesseurs de guitares qui incorporeraient des essences prohibées risquent la confiscation de l’instrument et une amende de 250 $. Gratteux vérifiez fissa votre matos! Heureusement que Oscar n’est plus là pour voir ça.
Pour finir dans l’actualité la « vidéo-annonce » de la sortie prochaine du CD Road Show n° 2 de Sonny Rollins, dont tout ce qu’on peut espérer est qu’il sera aussi bon que le n° 1...
A bientôt petits amis...
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