vendredi 10 juin 2011

Encore une bavure policière...

Bonjour chers petits amis,

Je viens de lire sur le blog d'un musicien américain une longue, et surement justifiée, plainte à propos du voyage en avion avec des instruments de musique.

C'est une histoire qui est aussi vieille que l'invention de l'aéroplane, même si les évènements du 11 Septembre n'ont rien arrangé. Du temps où les big bands sillonnaient la planète les incidents étaient fréquents; Count Basie a du souvent annuler des concerts, les instruments et les partitions n'étant pas arrivés, ou pire partis vers une autre destination. C'est arrivé une fois à Paris.

Le délicieux Jacques B Hess, enseignant, traducteur ( notamment de l'autobiographie de Charles Mingus ) était aussi contrebassiste et avait écrit une suite de petites nouvelles très amusantes sur "La contrebasse en avion". Évidemment l'harmoniciste est mieux loti que le joueur de tuba.

Bon, tout ça m'amène à quelque chose qui m'avait totalement échappé: ce qui est arrivé à l'automne 2006 à Paris au trompettiste Valery Ponomarev.



Si ce nom ne vous dit rien, Valery est un musicien russe viré américain et qui a notamment pendant plusieurs années fait les beaux jours des jazz Messengers ( où il avait je crois succédé à Winton Marsalis). Revenons à l'affaire telle que le la  décrit "The New York Time" dans son édition du 10 octobre 2006 ( je vous en ai évidemment, ne pouvant rien vous refuser, fait une traduction ):


Au moment où les autorités internationales s'efforcent d'harmoniser les myriades de règles régissant le transport des bagages, un jazzman américano-russe soigne un bras cassé lors d'une lutte avec la police française de l'aéroport au sujet du droit de garder sa trompette avec lui dans l'avion.

Le musicien en question, Valery Ponomarev, 63 ans,ancien membre des Jazz Messengers d'Art Blakey s'apprêtait à embarquer sur un vol d'Air India le 9 septembre de Paris vers New York où il réside quand un contrôle de routine a dégénéré en bagarre à propos de sa trompette « constellation » de 1961.

« Tous ceux qui pratiquent un instrument de musique connaissent le lien très fort entre le musicien et son instrument » dit M. Ponomarev «  Vous ne confieriez pas votre bébé à n'importe qui, c'est pareil pour votre instrument. »

Dans le cas précis, les liens étaient si fort qu'il n'a pas voulu abandonner l'étui de sa trompette, qui contenait également un bugle.

Mais les autorités ne l'ont pas entendu de cette oreille et maintiennent que le trompettiste a eu un comportement agressif vis à vis des personnes en charge du contrôle, en cette période de mesures de sécurité accrues.

Selon M.Ponomarev, quand il est arrivé en retard au contrôle pour embarquer, un employé nerveux d'Air India lui a retiré d'autorité sa trompette, sans explications, pour la faire mettre en soute.

M.Ponomarev a alors protesté avec vigueur, faisant valoir qu'il avait déjà voyagé sans problèmes avec son instrument sur d'autres vols et que, d'autre part, il avait remarqué qu'un autre passager avait été autorisé à embarquer avec un ( ou une je ne sais jamais...ndt ) sitar. Ses récriminations ont attiré l'attention d'un responsable d'Air India qui a appelé la police.

Quatre agents de la force publique sont alors accourus pour s'emparer de force de son étui, que M.Ponomarev a refusé de lâcher. Un des agents a alors tenter de le maîtriser en lui tordant le bras derrière le dos, ce qui a entraîné une fracture.

Les autorités aéroportuaires et la police confirment que cet incident s'est bien produit à Roissy Charles de Gaulle. Mais, insistent ils, le musicien est entièrement responsable de sa fracture.

« Les agents ont essayé de le maîtriser, mais il s'est blessé lui même en se débattant. » indique un porte parole de la police.

H.Rana, responsable du bureau parisien d'Air India, confirme que les employés de la compagnie ont appelé la police car M.Ponomarev refusait de se séparer de son instrument alors que les règles de la compagnie stipulent que les instruments de musique de taille importante doivent être placés en soute.

En Europe les règles de transport d'objets à bord varient selon les compagnies. La semaine passée la commission Européenne a édicté de nouvelles règles uniformes qui devraient prendre effet au printemps prochain. Ces règles restreindraient encore le transport de liquides et la taille admise des bagages à bord. Toutefois il pourrait y avoir des exceptions pour certains équipements photo et instruments de musique.

Ces changements arriveront trop tard pour M.Ponomarev qui dit qu'après sa fracture il a été détenu sans soins pendant six heures et n'a pas été autorisé à passer un coup de fil.

Finalement il a été emmené à l'hopital où un des médecins lui a prêté son téléphone portable avec lequel il a pu appeler l' ambassade américaine.

Après une opération M.Ponomarev est rentré aux états unis le 13 septembre sur un autre vol d'Air India. Avec une broche tenant les os de son bras gauche ensemble, M.Ponomarev indique que cela a eu un effet immédiat sur ses activités. Il a été obligé d'annuler des engagements et de limiter sa pratique quotidienne; il lui est trop pénible de tenir sa trompette avec son bras affaibli.

Fin Septembre toutefois il a décidé d'honorer un engagement prévu de longue date dans sa Russie natale ( bien qu'il réside aux Etats Unis depuis 1973) . Le présentateur, dit il, a annoncé au public que M.Ponomarev jouerait, bien qu'il ait été blessé lors d'une bagarre avec la police française.

« Je crois que le public a cru à une blague » dit il, mais il a pris le micro pour corriger l'annonce «  Ils n'ont pas gagné ! Ils m'ont cassé le bras mais ma trompette est toujours avec moi !»



Je ne sais trop que penser de cette histoire sauf que Valery a le sang chaud comme tous les slaves. Il est vrai que la police des aéroports ne fait généralement pas dans la dentelle. Par exemple lors de mon arrivée en Chine l'année dernière j'ai confusément senti que toute plaisanterie avec les représentants de l'autorité locale était à proscrire illico. Si je peux donner un conseil à Valery, si je peux me permettre de l'appeler Valery sans qu'il se fâche, c'est de voyager avec sa trompette à bord mais de mettre soigneusement son égo en soute.

Revenons à la musique, les russes doivent avoir un don particulier pour la trompette puisqu' après Valery un des meilleurs trompettistes de la nouvelle génération à New York est Alex Sipiagin (Alexei « sasha » sipiagin ) que vous pouvez entendre avec le Mingus Big band ou le sextet de Dave Holland. Ou sur ça qui est très bien:



Un petit coup de Valery ici, pour la route ( évitez Air India )




RIP again

Après Melvin Sparks, décidément le sort s'acharne sur les guitaristes jazzy/ bluesy/ funky/ groovy/ soul/ machin-bidule, puisqu'on apprend la disparition de Cornell Dupree à 68 ans.



Cornell était un stakhanoviste des studios puisqu'il aurait participé à plus de 2500 enregistrements. Comme tout le monde influencé au départ par T.Bone Walker, il a eu King Curtis pour mentor dans le métier et est devenu un peu le guitariste-maison chez Atlantic où il était surnommé "Uncle Funky".

Vous le connaissez sans le connaître puisque vous avez tous entendu ça, le "Respect" d' Aretha Franklin. C'est lui l'auteur de la géniale intro.

Cornell Dupree, ladies and gentlemen...


A bientôt chers petits amis...

1 commentaire:

  1. Ah, je m'en souviens très bien, ayant passé de nombreuses années professionnelles a CDG (non, pas à la PAF, je précise)....
    On avait même abordé ce sujet (très succinctement) sur Jazzitude à l'époque.

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